En janvier, je m’installe à Corbeil-Essonnes, par intermittence et pour une longue durée. L’exercice de la résidence. La chance d’y dormir, d’y faire mes courses, d’y passer mes journées, mes soirées. Et surtout d’avoir le temps de mettre mon regard sur pause.
Appareil photo en main, je traîne du matin à la nuit, dans les cafés, j’achète des kebabs, accepte des invitations à des barbecues, assiste à des mariages, squatte des bancs dans les parcs. J’y croise des habitants venant des cités et des zones pavillonnaires. Mes pieds foulent des aires bétonnées et des jardins sauvages, des trottoirs propres ou sales et surprise, des coins de campagne. C’est au hasard de ces trajets que je commence à photographier.
Je m’intègre lentement dans la ville. Je tente d’apprivoiser le quotidien de ses habitants. Je m’invite chez eux, dans leur vie. Je tente de m’effacer mais pas trop, je cherche surtout à établir du lien et créer des échanges tout en gardant à l’esprit que cela n’aura qu’un temps. Corbeil-Essonnes n’est pas une ville facile à photographier, c’est une ville en suspension…
En vivant quelques mois ici, et sans l’avoir anticipé, je rencontre une part banale et anodine, mais tellement importante de mon parcours personnel: les trajets à l’école avec mes enfants, les discussions sur le trottoir, les instants suspendus sur une pelouse baignée de soleil, les petits matins froids et les nuits qui, selon l’humeur et la saison, magnifient ou pétrifient tout.
Un an de ma vie pour, loin de la caricature qui trop souvent berce l’imagerie collective contemporaine, éprouver aujourd’hui l’envie de rendre compte de ces instants de vie, tellement simples, tellement humains, tellement ordinaires.